Comment remettre du dialogue et de la conversation dans l’entreprise
L’analyse des résultats de la Grande Etude Afci sur les nouveaux enjeux de la communication dans les organisations, le constat des bénéfices opérationnels des processus d’intelligence collective, la lecture des nombreuses études sociales sur les attentes des collaborateurs aujourd’hui, l’organisation d’un récent atelier de discussions entre 20 dirigeants d’entreprise et 10 jeunes professionnels réunis pour partager leur vision du monde de l’entreprise aujourd’hui pour demain –¦ toutes ces sources convergent vers une idée phare : remettre du dialogue dans les organisations est enjeu majeur pour qui veut entretenir une dynamique en interne.
Mais comment faire pour remettre du dialogue dans des organisations qui tournent à plein régime, qui comptent des milliers de collaborateurs, à qui il est demandé d’être toujours plus efficaces dans des délais toujours plus courts? Comment maintenir le dialogue dans des petites entreprises qui se développent, qui sont dans une course à la croissance et voient leur périmètre rh se transformer ? Comment nourrir le dialogue dans des PME o๠les contraintes commerciales, sociétales, réglementaires, fiscales, etc. préoccupent les dirigeants au point de s’oublier eux-mêmes ?
En autorisant une forme de proximité entre les salariés.
La question de la proximité en entreprise n’est pas (uniquement) géographique. Etre proches les uns des autres, c’est partager une proximité de sens, de valeur, de but et d’intérêt–¦ C’est œuvrer ensemble pour un projet commun, c’est prendre le même chemin et s’accompagner pour faire face aux aléas rencontrés. Mettre sur la table des sujets qui nous plaisent et nous ressemblent favorise le dialogue. Il s’agit néanmoins de composer des équipes à taille adaptée à cette conversation.
Cette proximité installée peut gommer encore les frontières entre la vie professionnelle et la vie privée, mais comment entrer en dialogue avec autrui sans être attentif à tout ce qu’il est dans sa globalité. Comment engager une conversation professionnelle, saine et efficace, si votre collègue est préoccupé par une question personnelle majeure ? Il me semble fini le temps o๠il fallait laisser ses problèmes personnels à l’entrée du bureau.
En se faisant confiance
Chaque situation à vivre au sein d’une entreprise est une opportunité de dialogue. Qu’il s’agisse d’une réussite à célébrer ou d’un échec à digérer. Mais comment oser dialoguer autour de tous les sujets sans confiance. Comme disait Pierre Desproges « on peut rire de tout mais pas avec tout le monde ». Et bien je dirais que dans l’entreprise on peut parler de tout, mais surtout avec ceux en qui on a confiance et en qui on peut faire confiance. La confiance ne se décrète pas, elle se gagne, elle se nourrit, elle s’entretient–¦ Pour avoir confiance en l’autre il faut d’abord avoir confiance en soi.
L’entreprise peut se saisir de ce sujet globalement en en faisant une des règles du jeu/valeur de fonctionnement collectif. Mais cela ne fonctionnera réellement que si chacun est accompagné sur ce chemin de la confiance. Pour nourrir cette idée, j’ai vu des entreprises former tous ses collaborateurs aux soft skills pour avancer sur ce chemin du développement personnel au service du collectif.
En favorisant le principe de subsidiarité
Car au plus proche du terrain seront prises les décisions, au plus intimes seront réunies les équipes impactées par ces décisions. Quand les collaborateurs destinataires d’une décision sont ceux qui prennent la décision, nous offrons aux collaborateurs la possibilité de prendre leur quotidien professionnel en main. Ils sont acteurs ils ne subissent plus. Ils se parlent pour prendre ensemble la meilleure décision.
Savoir questionner et accueillir les réponses
Si on prend la chaine basique de la communication, il y a un émetteur, un canal, un message et un récepteur. Mais si le récepteur n’est pas l’écoute, la chaine de communication est rompue.
En nous plaçant dans un système un peu plus complexe qu’est celui de l’entreprise, le schéma classique que l’on retrouve un peu partout c’est une direction émettrice d’un message, via des canaux de plus en plus digitaux, auprès de collaborateurs pas toujours récepteurs. Et ça s’arrête là . La chaine de communication est à nouveau rompue. Pour que cela fonctionne et que les rouages soient bien huilés, il est indispensable que les collaborateurs récepteurs deviennent émetteurs, et que les néo-récepteurs apprennent à accueillir ‘pour de vrai’ le message transmis–¦. Car dans ce contexte de communication ascendante, descendante, transverse, matricielle, etc. tous les sujets peuvent être abordés. Et d’une manière très naturelle et spontanée, la conversation peut retrouver toute sa place.
Passer de la diffusion d’information à la création de contenu
Quand les réunions d’équipe deviennent autre chose qu’un déversoir de sujets que le manager diffuse aux équipes (voir aussi l’article : Comment faire des réunions utiles), les temps de rencontre au sein d’une équipe, d’un collectif peuvent alors devenir intéressantes et productrices de contenus utiles.
Un contenu utile c’est un contenu métier qui va servir la mission de l’entreprise et son projet, un contenu qui va permettre à chaque collaborateur d’avoir toutes les informations nécessaires pour bien faire son boulot.
Un contenu utile c’est un contenu que nous appellerons corporate qui concerne la vie de l’entreprise et qui va permettre au collaborateur de comprendre les enjeux économiques et sociétaux de son organisation et se sentir fier de participer à un projet collectif d’une dimension bien plus large que son quotidien.
Et cette production de contenu est à réaliser par les collaborateurs qui vivent et font vivre l’entreprise. Et il est là le nouveau rôle des communicants internes–¦.
Vous l’aurez compris, remettre du dialogue et de la conversation dans les organisations est le nouvel enjeu des entreprises pour les prochaines décennies, mais c’est surtout un véritable défi pour les managers de ces mêmes organisations.
Si on regarde bien, c’est déjà aujourd’hui, une population très malmenée. Prise en étau entre des directives hiérarchiques qu’ils ne cautionnent pas toujours et des attentes de leurs équipes qu’ils ne comprennent pas toujours, les managers sont en proie à de véritables injonctions parfois contradictoires qui leur donne à voir une image d’eux-mêmes peu valorisante.
Il y a urgence à remettre du dialogue et de la conversation dans les organisations en s’occupant des managers. Il existe des formations pour les aider à acquérir les nouvelles compétences d’un métier en mouvement. Il y a le co-développement pour apprendre entre pairs et se nourrir des bonnes pratiques. Il y a le coaching individuel qui permet d’éviter qu’il ne soit trop tard pour certains.
Et il y a surtout du temps que l’organisation doit leur laisser pour remettre le dialogue et la conversation au cœur des organisations. Ce n’est pas du temps perdu (je vous entends déjà ) c’est du temps qui pleinement partie de leurs missions–¦ Et tout cela n’aura de sens et d’effet que si la direction générale, le codir, le gérant, etc. porte et incarne le dialogue et la conversation.