15 février 2021

Comment relancer la productivité collective des entreprises?

Le 8 février dernier, Benoît SERRE, Vice-président de l’Association Nationale des Directeurs des Ressources Humaines (ANDRH), intervenait sur Europe 1 sur la question du télétravail en entreprise. Dans cet interview, il évoque l’impact du covid sur la productivité collective des entreprises.

https://www.europe1.fr/emissions/linterview-de-5h40/teletravail-les-entreprises-sont-en-train-de-se-remobiliser-selon-benoit-serre-4023758

La situation sanitaire qui perdure impose de limiter les interactions sociales et les déplacements, et la règle du télétravail reste de vigueur. 

Cela signifie que dans toutes les entreprises, les travailleurs, salariés comme indépendants, dont les activités peuvent être exercées à  distance, doivent respecter ces 3 cas de figure :

  • 1er cas de figure : un travailleur qui peut effectuer toutes ses tâches en télétravail doit le faire 5 jours sur 5. Une souplesse s’entend sur 1 jour par personne en présentiel.
  • 2ème cas de figure : les travailleurs qui ne peuvent pas effectuer toutes leurs tâches à  distance peuvent se rendre une partie du temps sur leur lieu de travail (exemples : un ingénieur, un technicien ou un architecte ayant besoin d’équipements spécifiques pour travailler). Toutefois, l’organisation du travail doit permettre de regrouper ces activités pour limiter les déplacements.
  • 3ème cas de figure : certains métiers ne peuvent être réalisés à  distance (salariés des commerces restant ouverts, chefs de chantier et ouvriers du BTP, agriculteurs, intervenants à  domicile–¦). L’activité doit se poursuivre et la présence sur site est autorisée, dans le strict respect des règles sanitaires.

Dans son interview, Benoît SERRE revient sur les énormes efforts consentis par les entreprises qui ont su s’adapter. Mais après presque 1 an de télétravail, de nombreux salariés expriment fortement le besoin de revenir sur le lieu de travail.

D’abord individuellement, l’enjeu est psychologique. L’être humain est un animal social, il n’existe que par les autres, par leur contact et leur regard. Ses actions, ses comportements n’ont de sens que par rapport aux autres. L’homme a besoin des autres pour se connaître, construire sa vie, acquérir son identité, son autonomie. C’est un être pensant et un être relationnel: il n’existe que parce qu’il communique.

[Je vous invite à  relire « Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier]

Il en va de la santé mentale de chacun de pouvoir se reconnecter aux autres.

Puis collectivement, l’enjeu est la productivité de l’entreprise. Au TC 3’07 de son interview, Benoît SERRE confirme que le télétravail a pu être bénéfique pour la performance individuelle. Une économie s’est naturellement faite sur le temps gaspillé et une forme d’efficacité individuelle s’est faite ressentir. Par contre, la productivité collective n’est pas bonne.

Ce constat semble assez partagé. Les dirigeants et les managers se questionnent sur la dynamique à  mettre en place pour maintenir le lien avec des équipes qui ne partagent plus ce quotidien parfois tumultueux mais fédérateur. Les chefs de projets constatent que, malgré tous les outils digitaux mis en place,  la chaîne de communication s’est rompue parce que les salariés « s’oublient ». Les professionnels des RH tentent de faire coà¯ncider au mieux les contraintes opérationnelles (propres à  chaque entreprise) avec les obligations légales (très généralistes).

Alors comment relancer la productivité collective des entreprises et prendre soin de la santé mentale de ses équipes tout en respectant les règles du travail à  distance ?

A entendre certains dirigeants raconter la gestion du télétravail dans leur entreprise, la priorité est donnée à  l’activité. Pour exemple, une équipe de 5 personnes se relaie toute la semaine pour que, chaque jour, le maintien de l’activité et le service client soient permanents sur site. L’intention est bonne mais le résultat est collectivement contre-productif.

Et si, dans ce même exemple, les 5 collaborateurs se retrouvaient pour une journée de travail collaborative  ? Une journée pour (re)faire équipe. Il ne s’agira pas de se retrouver chacun derrière son bureau à  faire la même chose que ce qu’il est possible de faire en télétravail. Il s’agira d’organiser des ateliers de travail, de réflexion, de partage, de co-construction, etc.

A l’issue de cette journée, chacun repart avec un plan d’action individuel défini collectivement. Et tous les autres jours de la semaine télé travaillée, le salarié œuvre un service d’un projet commun, définit par une équipe à  laquelle il fait pleinement partie, il sait le rôle qu’il a à  jouer au service du collectif, il sait comment il doit, peut, interagir avec ses collègues d’ici la prochaine journée en présentiel.

L’exemple donné ici est théorique et s’inscrit stricto-sensu dans les règles sanitaires (à  savoir 6 personnes maximum). Mais comment faire dans la vraie vie d’une entreprise ? Le jeu de questions-réponses ci-dessous ouvre les champs des possibles, mais il est évident que derrière la simplicité des exemples et des ‘invitations à  faire’, se cache la complexité de chaque organisation. Nous parlons bien ici d’un travail artisanal.

Mais tant que le dirigeant, le manager a l’intention d’agir dans ce sens, il saura trouver les ressources pour mettre en œuvre ces temps collectifs nécessaires aux individus et à  l’entreprise. Il est entendu également que cette proposition de présentiel collectif s’organise dans le respect des gestes barrières requis.

Et si j’ai plus de 5 collaborateurs dans la même équipe ?

« Découpez » vos équipes en petits groupes de 5 à  10 personnes. Alternez la composition des groupes pour que les interactions soient maximales. Ce n’est pas parce que vous gérez de grosses équipes que vous devez priver vos collaborateurs de ce lien social. Et pas la peine non plus de monter des usines à  gaz. L’art de la simplicité est maître.

Et si mes collaborateurs ne souhaitent pas venir au bureau le même jour ?

En cette période fragile, il est important de rester à  l’écoute des contraintes ressenties par les collaborateurs. La vigilance est de mise sur la distinction entre la recherche de confort personnel (attention, l’entreprise, même s’il y fait bon travailler, est aussi un espace de contraintes) et la réelle peur de s’exposer (aux autres, au virus, au travail, etc.).

Comment maintenir l’activité si je n’organise pas la permanence des collaborateurs en présentiel ?

Cela fait un an que de nombreuses solutions digitales ont émergé pour faciliter le travail à  distance et le maintien de la relation clientèle. Le client n’est pas l’arbre qui cache la forêt.

A quoi sert cette journée puisque chaque collaborateur travaille sur un projet différent ?

L’équipe est complémentaire. Même si chaque membre de l’équipe est expert dans son domaine et que chacun œuvre sur des chantiers, à  priori, différents, la transversalité et l’entraide sont nécessaires pour la performance de chacun. C’est ce sujet qui peut être mis sur la table de la journée collaborative.

Quand je m’entretiens avec mes collaborateurs, je dois aller à  l’essentiel, je n’ai pas de temps à  perdre–¦

Si vous ne prenez pas suffisamment de recul, vous pouvez passer beaucoup de temps à  buter contre la contre marche sans réussir à  monter la suivante. Tandis que si vous reculez suffisamment vous pouvez voir l’ampleur de l’escalier et trouver le moyen de monter plus facilement toutes les marches. Votre journée collaborative vous permettra d’atteindre ensemble plus rapidement le haut de l’escalier.

Vous avez d’autres questions ? N’hésitez pas à  prendre contact avec nous, nous vous apporterons peut-être un regard éclairant sur votre problématique.

Et vous pouvez aussi télécharger le Contrat de service entre collègues que nous vous avions suggéré il y a déjà  quelques mois et qui peut faciliter ce travail d’équilibre entre distanciel et présentiel.


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